Cautionnement : Notion de disproportion des engagements / Défaut de devoir de mise en garde et impacts de l’ordonnance n°2021-1192 du 15 septembre 2021.
La caution qui est actionnée en paiement par la banque peut, pour se défendre, soulever un manquement de la banque au titre de son devoir de mise en garde contre un risque d’endettement excessif et/ou au titre d’une disproportion des engagements.
Notre cabinet a observé que ces notions peuvent être confondues. Pourtant il convient de distinguer défaut de devoir de mise en garde et disproportion des engagements :
DEFAUT DE DEVOIR DE MISE EN GARDE CONTRE UN RISQUE D’ENDETTEMENT EXCESSIF | DISPROPORTION
DES ENGAGEMENTS |
|
Charge de la preuve | La banque doit démontrer qu’elle s’est renseignée et qu’elle a respecté le devoir de mise en garde | La caution doit rapporter la preuve d’une disproportion lors de la signature de l’acte, à charge pour la banque de démontrer qu’au jour de l’appel en paiement il n’y a plus de disproportion. |
Sanction | Dommages intérêts au titre de la perte d’une chance | Inopposabilité de l’acte de cautionnement |
Caractère averti | La banque n’est pas tenue d’un devoir de mise en garde si la caution est dite avertie | La notion de caution avertie ne s’applique pas en matière de disproportion des engagements. |
Une réforme majeure est intervenue suite à l’ordonnance n°2021-1192 du 15 septembre 2021, impliquant de distinguer les cautionnements conclus avant le 1er Janvier 2022 et après le 1er Janvier 2022.
I – Sanction du caractère manifestement disproportionné de l’engagement de caution souscrit après le 1er Janvier 2022.
L’ordonnance n°2021-1192 du 15 septembre 2021 réforme les règles concernant la disproportion de l’engagement aux biens et revenus de la caution.
Auparavant la disproportion était visée par le code de la consommation. A compter du 1er janvier 2022, pour les cautionnements conclus après cette date, il convient de se référer à l’article 2300 nouveau du code civil :
« Si le cautionnement souscrit par une personne physique envers un créancier professionnel était, lors de sa conclusion, manifestement disproportionné aux revenus et au patrimoine de la caution, il est réduit au montant à hauteur duquel elle pouvait s’engager à cette date ».
Les modifications apportées par cet article sont les suivantes :
- Désormais, la disproportion ne s’apprécie qu’au jour de la conclusion de l’engagement, alors qu’auparavant le créancier pouvait échapper à la sanction s’il démontrait que la caution était en mesure de faire face à l’engagement au moment où elle était appelée en paiement, la charge de la preuve incombant au créancier.
- Auparavant la sanction était l’inopposabilité de l’engagement. Le nouvel article 2300 du Code civil prévoit la seule réduction de l’engagement au montant à hauteur duquel la caution pouvait s’engager à cette date.
II – Sanction du défaut de devoir de mise en garde concernant l’engagement de caution souscrit après le 1er Janvier 2022.
Cette obligation jurisprudentielle se fondait sur l’article 1147 du Code Civil devenu 1231-1 par l’ordonnance n°2016-131 du 10 février 2016.
Désormais, cette obligation de mise en garde figure à l’article 2299 du Code Civil :
« Le créancier professionnel est tenu de mettre en garde la caution personne physique lorsque l’engagement du débiteur principal est inadapté aux capacités financières de ce dernier.
A défaut, le créancier est déchu de son droit contre la caution à hauteur du préjudice subi par celle-ci ».
Les modifications apportées par cet article sont les suivantes :
- Cet article indique que le créancier professionnel, terme donc plus vaste que le seul créancier bancaire, doit mettre en garde la caution et non plus seulement la caution non avertie.
- La sanction n’est plus l’octroi de dommages intérêts. En cas de manquement, le créancier est déchu de son droit à hauteur du préjudice subi.